Je ne pouvais pas ne pas vous parler d'elle

Une photo sur une annonce, pas du grand art mais cette petite bouille m’attire.

J’en parle à Chéri et il me propose d’aller la voir… Presque trois heures de route plus tard, me voilà face à elle. Une petite jument espagnole baie. Sa maman est grise et son papa alezan.

Elle est très jeune et je m’attends donc à ce qu’elle soit inapprochable… et pourtant…

Je m’étais dit que je ne voulais plus de poulain mais il faut croire que j’aime me contredire…
Yupioca est entrée dans ma vie !

A nous deux, on se en fait des délires …

Mais aussi des vadrouilles…

Nous avons aussi travaillé à pieds, parfois seules, parfois avec une prof

A ses trois ans, nous avons commencé un pré-débourrage : pas de monte mais simplement découvrir tout le matériel et l’y habituer, la travailler à pieds avec tout ça…

Puis à ses quatre ans, j’ai commencé à me porter sur son dos, en sac à patates, et au fur et à mesure à passer la jambe...

C’étaient des moments magiques…

Puis ce fut la descente en enfer.
Un accident en prairie début novembre (un cheval qui l’a shootée), une visite d’un vétérinaire qui n’est pas mon habituel (parce que le propriétaire de l’écurie n’a pas jugé utile de m’avertir et moi, je n'étais pas présente, je faisais de nombreuses heures d’auto-école pour passer mon permis, puis je l’ai passé dans la foulée, je ne suis donc pas passée mais le proprio de l'écurie était au courant... Je m’en voudrai toujours… Mais je faisais confiance, le proprio avait mon numéro en cas d’urgences), un mois de soins (douche de la jambe, injection, médicaments dans les grains, deux semaines de crème qui n’agissait pas puis je suis passée au miel + huiles essentielles de tea tree et ça a été mieux)…

Début décembre, un matin j’arrive à l’écurie pour les soins quotidiens et je vois ma jument couchée bizarrement dans son box. Je cours pour la relever et à peine sortie du box, elle se jette à terre… Colique !
Je la marche… Longtemps… Plus de huit heures en fait… J’aurai fait venir le vétérinaire trois fois ce jour là… Je sais que marcher lui fera du bien mais je sais aussi que pour sa jambe, c’est un énorme retour en arrière, il y aura des complications… Mais je dois faire passer cette colique… A 23 heures, tant pis, je rappelle le vétérinaire pour une injection afin de l’aider à gérer la douleur lors du transport et j’appelle un ami qui me fera le transport… Direction la clinique vétérinaire !

Là-bas, je n’ai que des compliments sur l’attitude exemplaire de ma jument. Une vétérinaire me dit même que des chevaux de 10/15 ans n’ont pas cette éducation, que ça fait plaisir de la soigner.
Ce sont des paroles qui font du bien malgré la situation.
Le lendemain matin seulement, ils arriveront à faire passer la colique.

Je mènerai ma petite enquête plus tard et il s’avèrera que le proprio de l’écurie coupait l’eau la nuit et la remettait un peu avant que je n’arrive le matin… Elle aura eu très soif et aura bu trop vite de l’eau trop froide. Je découvrirai également que le propriétaire toujours aura déplacé ma jument de prairie pour la mettre avec un cheval de trait shooteur parce que ça l’ennuyait sec qu’elle soit avec des poneys (avec qui elle s’entendait merveilleusement bien).
En fin de compte, c'est ce propriétaire qui aura tué ma jument...

Vu que je suis à la clinique vétérinaire, je demande dès le lendemain de faire une radio de sa jambe… Cette blessure ne guérissait pas malgré les gros soins que je faisais quotidiennement.
Le verdict est tombé le lendemain alors que j’étais en formation : Fracture, des tous petits os promenaient partout, la capsule synoviale avait explosé et c’est ce liquide qui s’écoulait de sa plaie (j’avais longtemps pensé à du pus mais je trouvais ça louche, pas d’odeur et surtout, ça ne s’arrêtait jamais alors que la plaie était belle). Ils m’ont proposé une opération hors de prix et sans certitude d’un mieux, ils m’ont aussi proposé de la « laisser comme ça » et de voir à peut être faire des infiltrations dans 5 ans pour la douleur, elle souffrait clairement…
J’ai demandé l’avis d’un spécialiste orthopédique qui m’a dit que c’était peine perdue, il y avait une chance sur un millier, elle avait vraiment mal (et ne montrait rien lors des soins, brave jument)…

C’est lorsque je l’ai vue marcher jusqu’à l’orthopédiste que j’ai réalisé à quel point tout était foutu. Je me suis écroulée en larmes, j’étais là juste derrière elle et je la voyais peiner à se déplacer, souffrir comme on ne pouvait l’imaginer. J’ai demandé à tout arrêter. Je ne voulais pas m’acharner.

Je resterai sur cette dernière photo d’elle dans son box à la clinique, elle n’avait pas perdu l’appétit

Ma douce Yupioca, j’espère que là où tu es, tu ne souffres plus et que tu gambades comme une folle dans ces si belles prairies, à faire tes sauts de cabri et tes « oreilles de mauvaise ». Je t’aime ma princesse.